Vendredi 17 janvier, au cinéma Megarama à Bordeaux, les quatre « grands » patrons de Sud Ouest ont dévoilé à leurs lecteurs la stratégie du journal pour 2014-2015 dans le cadre d’une rencontre organisée par l’Alimso (Association des Lecteurs, Internautes et Mobinautes de Sud Ouest) C’est un fait suffisamment rare pour être souligné. Pour la première fois, lire la suite
Vendredi 17 janvier, au cinéma Megarama à Bordeaux, les quatre « grands » patrons de Sud Ouest ont dévoilé à leurs lecteurs la stratégie du journal pour 2014-2015 dans le cadre d’une rencontre organisée par l’Alimso (Association des Lecteurs, Internautes et Mobinautes de Sud Ouest)
C’est un fait suffisamment rare pour être souligné. Pour la première fois, Olivier Gerolami, président du directoire du groupe Sud Ouest, Patrick Venries, directeur de la publication de Sud Ouest, Yves Harté, rédacteur en chef du journal et Sébastien Marraud, patron de sudouest.com, sont venus exposer aux lecteurs les évolutions du quotidien et en débattre pendant 1h30. 2014 est une année cruciale pour le journal. C’est l’année, où plus que jamais, le quotidien régional, qui a refondu son site Internet le 16 décembre, va mettre l’accent sur le numérique pour séduire de nouveaux lecteurs et développer ses recettes publicitaires. « C’est aussi l’année, où Sud Ouest fêtera ses 70 ans », a rappelé, en préambule, Marcel Desvergne, président de l’Alimso, qui compte déjà 180 adhérents. « Les premiers retours sur le site semi-payant sont encourageants. Nous avons plus d’abonnés que prévu. Et la plupart restent fidèles après le premier mois de promotion », a dévoilé Olivier Gerolami.
Pluri-écrans et personnalisation plus grande de l’information
L’animateur du débat, Jean Petaux, professeur à Sciences Po Bordeaux, a commencé par interroger Olivier Gerolami sur sa vision des évolutions du métier. « Sud Ouest a les mêmes problématiques que les grands médias comme Canal +, TF1… c’est à dire comment arriver à délivrer des contenus de qualité en participant à la révolution numérique. C’est une révolution qui impose de revoir sa culture par rapport à ses lecteurs et au territoire », a insisté cet enarque qui a fait l’essentiel de sa carrière dans la télévision. « La tendance est à l’activité numérique pluri-écrans avec une personnalisation de plus en plus grande de l’info. Mais, le journal restera de qualité », a-t-il assuré.
Un mouvement de concentration inévitable dans la PQR
Autre tendance lourde, un mouvement de concentration dans la presse quotidienne régionale est en cours dans tous les pays développés. « La France commence à rattraper son retard en la matière », a estimé Olivier Gerolami. Il en veut pour preuve que tout l’Est de l’Hexagone est désormais sous la coupe du Crédit mutuel. Le groupe Rossel est, quant à lui, très implanté dans le nord. Ouest-France dans l’ouest et le centre. Le groupe Sud Ouest, pour sa part, est à la fois présent en Aquitaine, Poitou-Charentes et Languedoc-Roussillon. « Aujourd’hui, le groupe Sud Ouest n’a pas les moyens d’acheter d’autres titres », a indiqué Olivier Gerolami. Pour se développer, le groupe cherche d’ailleurs actuellement de nouveaux investisseurs et à lever plusieurs millions d’euros. A l’avenir, « il faudra mutualiser les coûts techniques, mettre en commun les capacités de développement entre plusieurs groupes de presse, tout en gardant l’ADN de chaque titre », a-t-il prédit. Pour autant, malgré la crise de la presse, il n’est pas question de se délester de certains journaux du groupe Sud Ouest, a assuré Olivier Gerolami. D’ailleurs, il a précisé que le groupe devrait être à l’équilibre fin 2014 après une restructuration au sein de Midi Libre en 2012, puis Sud Ouest en 2013 (125 départs, dont 23 journalistes), qui permet d’alléger les coûts de 9 millions d’euros.
Une nouvelle relation à tisser entre lecteurs et journalistes
« Ce qui doit changer, c’est la réponse du journal à ses lecteurs. Le nouveau Sud Ouest va imposer que nous soyons plus réactifs par rapport à nos clients, à leurs demandes. C’est Sud ouest qui doit écouter, se tourner davantage vers l’extérieur », a lancé Patrick Venries, son directeur de publication. « Nous avons eu un problème de PDF la semaine dernière. Nous avons eu 400 mails en 10 minutes. En face, il y avait 5 personnes pour répondre. Il faut fiabiliser le processus de fabrication. Ces problèmes ne sont plus tolérables aujourd’hui », a-t-il expliqué. Patrick Venries a aussi invité à briser certains tabous. » Il ne faut plus hésiter à parler de lecteurs comme des clients et mettre mieux en avant ce que l’on sait faire pour vendre davantage », a-t-il ajouté. Ce qui suppose de faire du marketing : « est-ce que ce que je crois bon de faire est vraiment ce qui intéresse encore le lecteur ? », a déclaré Patrick Venries, convaincu que la crise de la presse est aussi une crise de l’offre éditoriale. « Pourquoi, par exemple, se priver de l’information sur la relation entre le président de la République et Julie Gayet », s’est-il interrogé.
La stratégie numérique…, bientôt un quotidien du soir
La stratégie de Sud Ouest pour les prochains mois et années est claire : développer des contenus numériques avec des espaces payants pour abonnés et accroître ses recettes publicitaires numériques. A ce titre, le journal a été le premier en presse quotidienne régionale à signer un accord avec la régie publicitaire de Google pour vendre des Adwords. L’exemple à suivre, c’est le New York Times, qui compte désormais plus d’abonnés numériques que papier. « On se donne les moyens pour avoir de nouveaux outils et pour rendre la marque Sud Ouest pérenne », a assuré Patrick Venries. Ainsi, au premier trimestre 2014 va être lancée une édition du soir numérique. « A échéance de 2 à 3 ans, l’objectif est que 10% des recettes viennent des abonnements numériques », a dévoilé Olivier Gerolami. « La diffusion papier recule de l’ordre de 3 à 3,5% comme pour toute la presse quotidienne, mais l’audience de la marque est bien plus importante qu’il y a 15 ans grâce au site Internet qui a progressé de 50% entre 2011 et 2012 et autant entre 2012 et 2013 », a-t-il mis en avant. D’ailleurs, contrairement à certains préjugés, les dirigeants du journal ont confirmé qu’il n’y avait pas que des jeunes à lire Sud Ouest en ligne. Loin de là. A noter, par ailleurs, qu’en avril, l’ensemble du journal sera imprimé en couleurs, sans hausse de prix.
Une nouvelle hiérarchie de l’information
Internet modifie profondément la hiérarchisation de l’information. « Quand le Web a pris l’information sur Serge le lama, c’est là qu’elle est devenue mondiale », a raconté Yves Harté. « Les articles intéressants du papier ne font pas beaucoup d’audience sur le web et vice-versa. Le support induit une grammaire différente. Lorsque deux joueurs du club de rugby d’Agen se sont battu, on a fait un entre filet dans le journal et le grand papier sur le match. Sur le web, c’est le sujet sur la bagarre qui a été vu le plus et a fait pic d’audience », a rapporté Patrick Venries. Même chose quand sudouest.com fait la Une sur le château dans le Gers des parents de Julie Gayet, ça a fait le tour du monde. Problème, « sur le net, la hiérarchie des informations est dictée par les lecteurs », a regretté Yves Harté. « C’est pourquoi il y a une zone payante pour préserver l’image de marque du média et ne pas être obligé de ne faire que du trash », a enchaîné Patrick Venries. Autre changement, « le journaliste, aussi, peut devenir une marque aussi sur les réseaux sociaux », a-t-il relevé. Sur le plan des compétences requises, les choses évoluent très vite aussi. Certains journaux américains n’embauchent plus de journalistes ne sachant pas coder.
Une forte attente des lecteurs sur le fact-checking
Sud Ouest a lancé dans son édition du 17 janvier une nouvelle rubrique consacrée au fact-checking, la vérification d’une déclaration publique d’un politique ou autre. Cette tendance a émergé lors de la dernière campagne présidentielle. Un lecteur a d’ailleurs suggéré qu’un service y soit dédié au sein du journal. « Vous n’êtes pas assez agressifs sur toutes ces fausses informations qui circulent sur les réseaux sociaux. C’est votre boulot de journaliste de dire la vérité », a-t-il lancé. Autre question posée : comment faire en sorte qu’un Internaute reste le plus longtemps possible sur le site de Sud Ouest ? « Nous développons des contenus journalistiques plus longs, du data journalisme et la gamafication pour faire jouer l’internaute sur l’actualité », a répondu Sébastien Marraud. Actuellement, sudouest.com emploie 10 journalistes à plein temps. Mais, « il n’y a plus d’un côté la rédaction papier et Internet. C’est fini. L’ensemble des rédactions est passé au pluri-media », a conclu Olivier Gerolami. Et c’est ce qui va amener de profonds changements à Sud Ouest dans les prochains mois sur la façon de travailler des journalistes, bouleverser les contenus et la hiérarchie de l’information.
Nicolas César
Perso, j’ai adoré:
Bravo pour la sirène… Au moins on s’en souviendra !
Il y a eu quelques idées TRES intéressantes dans le public…
-Faire de quelques journalistes des « STARS » ( au sens d’aujourd’hui type reality show) …
Par exemple monter le médiateur Thierry Magnol en puissance…pourquoi pas avec TV7 et un show mensuel en public !
-L’idée du lecteur d’écumer les réseaux et remettre les pendules à l’heure sur quelques infos dangereusement fausses…qui polluent les esprits. Comme rubrique régulière de fact-checking !
Bravo encore.
A la prochaine Marcel.