La première journée des rencontres annuelles a survolé une période très riche pour notre société, mais aussi pour une institution comme le Club de la Presse de Bordeaux. Avec l’évocation de souvenirs vécus par des anciens présidents. « Je voudrais ici rendre hommage à Marie-Christine Cherruau, qui a toujours soutenu l’action du Club avec son mari, lire la suite
La première journée des rencontres annuelles a survolé une période très riche pour notre société, mais aussi pour une institution comme le Club de la Presse de Bordeaux. Avec l’évocation de souvenirs vécus par des anciens présidents.
« Je voudrais ici rendre hommage à Marie-Christine Cherruau, qui a toujours soutenu l’action du Club avec son mari, notre président-fondateur ». Jean Berthelot de la Glétais, l’actuel président du club, a dévoilé le 29 avril une plaque en l’honneur de Pierre Cherruau, à l’entrée de la grande salle de conférences de presse. Cette salle portera désormais son nom, en souvenir de notre confrère à l’époque grand reporter à Sud Ouest et correspondant du Monde.
REGINE BUCHOLTZ, DEVANT DES PHOTOS DE SON FILS, JEREMIE, PHOTOGRAPHE, DECEDE A 40 ANS DANS UN ACCIDENT DE LA ROUTE.
« Nous inaugurons également une nouvelle exposition photo (*), a ajouté le président, réalisée par Maylis Détrie et Philippe Roy avec Laura Bonvalot notre coordinatrice, et une expo de dessins politiques sur les médias, du journaliste-dessinateur Michel Iturria, qui a toujours soutenu le Club depuis sa création. »
Celui-ci était présent, et il a expliqué avec humour « avoir cherché dans ses 14.000 dessins publiés ceux qui concernaient les médias et en avoir trouvé plus que prévu ». C’est que le thème a fait l’événement assez souvent dans ces 40 années où le numérique est monté en puissance face aux médias traditionnels.
Quentin Guillon, notre secrétaire général-adjoint, animait le débat entre quatre anciens présidents du Club, sur autant de thèmes marquants : Jean-Claude Sire, ancien directeur du développement de France 3 Aquitaine, sur l’information de proximité, Claudia Courtois, correspondante du Monde puis dircom de Talence, sur l’information et la communication, Marie-Christiane Courtioux, ex-rédactrice en chef de Radio Monte-Carlo sur « Où est la femme ? » et Jean-Pierre Spirlet, ancien délégué à l’éducation aux médias à Sud Ouest, sur les solutions apportées par la formation du public.
Il y avait également dans la salle un autre ancien président, Patrick Berthomeau, venu de La Rochelle, et qui avait fait partie du premier bureau de 1979. « Avec d’autres, précise-t-il, comme Michel Cassany, de l’AFP ou Georges Bourdoiseau de RTL. »
« Au départ, note Jean-Claude Sire, l’idée lancée par Pierre était de trouver un lieu qui nous permette de nous retrouver, journalistes, correspondants de médias et pigistes, afin de créer des échanges et une sorte d’entraide. » Et Marie-Christiane Courtioux ajoute que si certaines radios avaient quelques réticences à voir leur représentant participer à une organisation comme le Club de la Presse – l’une d’entre elles, à Paris, avait d’ailleurs donné ce nom depuis longtemps à l’une de ses émissions fétiches – « on peut citer ici les réactions positives de Sud Ouest, avec Jean-François Lemoîne qui avait apporté son soutien ».
Le premier thème de la rencontre était l’information de proximité. Jean-Claude Sire remonte jusqu’à Théophraste Renaudot, premier journaliste français qui créa sa Gazette en Touraine en 1631, avec des nouvelles locales, « avant qu’il ne se lance à Lyon puis à Bordeaux en 1638. » Puis il faut attendre le XIXème siècle pour entregistrer un nouvel élan de la presse de proximité, avec un développement des techniques d’imprimerie. Au XXème siècle ce seront les radios et la télévision, avant l’irrésistible montée du progrès numérique que nous connaissons. « A Bordeaux les Américains avaient installé une Radio Bordeaux La Fayette dès 1944, et des radios locales furent créées ensuite. La télévision a commencé ses premiers décrochages régionaux en 1954. Il y avait deux ou trois journaux régionaux par semaine. »
Créer une communauté
Le second thème, « information et communication », rappelle que le Club fut créé il y a quarante ans par des journalistes, membres actifs de l’association, mais également avec des membres associés, les communicants. Ils sont bien séparés, et dotés chacun de leur charte déontologique, dont le respect mutuel a toujours été en exergue au Club. Le premier délégué des communicants, co-fondateur du Club, fut James Trijean, dircom du port de Bordeaux, qui était président de l’Association Française des Relations Publiques (devenue l’APACOM dans notre région). Claudia Courtois a connu, l’un après l’autre, les deux statuts professionnels.
« Depuis deux mois et demi, répond-t-elle, je travaille pour un jeune maire, Emmanuel Salaberry, qui m’a dit tout de suite : on s’intéresse aussi à Facebook, Twitter, Instagram. Il se préoccupe toujours des médias traditionnels mais il veut utiliser les nouveaux moyens, de façon organisée. » Pour elle, l’enjeu n’est plus uniquement de faire de l’info locale mais « de créer une communauté ». Une démarche planifiée, qui n’est pas celle « d’autres élus que j’ai vus, même au milieu d’une conférence de presse, envoyer des messages sur Twitter. Ils travaillent dans l’instantanéité. »
Et cela peut poser des problèmes de vérification de l’info, de distance et de recul sur celle-ci. Les « fake news » ne sont pas loin.
Pour évoquer le troisième thème, « Où sont les femmes ? », Marie-Christiane Courtioux rappellera sa carrière, bien remplie, de la première émission de rock à FR3 Bordeaux Aquitaine, un passage à Sud Ouest, l’arrivée à Radio Monte Carlo et la rédaction en chef. « Alors y a-t-il vraiment des femmes aujourd’hui dans le métier ? La réponse est oui, par exemple, elles sont 38% à la télévision. Mais quand Jean-Marie Dupont voulait me faire venir à la tête de la rédaction de France 3 Bordeaux-Aquitaine, je me disais : « jamais ils ne m’accepteront, moi une femme« . Quand j’étais à Sud Ouest il y avait plus de femmes que d’hommes à la rédaction. Indéniablement les femmes ont apporté quelque chose à ce métier, notamment sur l’info de proximité et sur le traitement de la vie des gens. »
Sur l’adaptation à la révolution numérique, elle estime « qu’aujourd’hui il y a beaucoup de jeunes sortant des écoles de journalisme qui savent utiliser tout de suite les outils. »
Le quatrième thème, sur les solutions possibles à la défiance d’une partie du public envers les journalistes, il fut rappelé l’action du Club depuis ses débuts : des journalistes allaient dans les écoles parler de leur métier, puis quand le CLEMI a créé la Semaine de la Presse en 1989, des classes ont été reçues rue des Capérans. Des stages d’enseignants et d’élèves de troisième ont été accueillis, et par ailleurs, dès les années 2000 un statut de membre étudiant a été proposé au Club par Philippe Loquay. Et de nombreuses actions d’accueil et de formation des jeunes sont organisées par le « Club Pigistes » alias la « Tour de Piges ».
« Cette profession ne s’exerce pas n’importe comment, conclura Jean Berthelot de la Glétais, le président du Club, et aujourd’hui il est beaucoup plus compliqué qu’hier de conserver nos valeurs. Mais le Club peut être le lieu où avancer ensemble dans ces domaines. Nous pouvons imaginer d’autres actions, ainsi que nous le verrons demain à l’IJBA. Nous avons eu un débat avec les gilets jaunes, pour les aider à comprendre notre fonctionnement et nos règles. »
Et de lancer un appel : « Aidez-nous à réfléchir sur les objectifs du Club. Que cet anniversaire des 40 ans soit un début et non une fin. »
_________________________________
(Photos : Philippe Roy, président du Club en 1996-97)
———————————————————