La liberté d’expression assassinée La rédaction du journal « Charlie-Hebdo » a été la cible d’une attaque terroriste en milieu de journée à son siège parisien. A cette heure, le bilan fait état de douze morts dont huit journalistes et deux policiers en charge de la sécurité des lieux. A cela s’ajoutent onze blessés graves. lire la suite
La liberté d’expression assassinée
La rédaction du journal « Charlie-Hebdo » a été la cible d’une attaque terroriste en milieu de journée à son siège parisien. A cette heure, le bilan fait état de douze morts dont huit journalistes et deux policiers en charge de la sécurité des lieux. A cela s’ajoutent onze blessés graves.
L’Union des Clubs de la Presse de France et francophones s’insurge contre cette nouvelle atteinte visant directement la liberté d’expression et les mots ne sont pas assez forts pour exprimer notre indignation et notre colère.
Nos premières pensées vont en direction des familles suite à cet acte ignominieux qui est une attaque directe contre notre démocratie.
Cet acte touche directement un journal indépendant dont les journalistes accomplissent leur mission au péril de leur vie. Les « caricatures de Mahomet » avaient déjà attiré les foudres d’une frange d’activistes en 2007. Depuis « Charlie-Hebdo » faisait l’objet d’une protection policière.
Quand on s’attaque à la liberté d’expression et donc de la presse, c’est l’humanité qui est en danger.
Rien ne saurait justifier cet acte criminel au nom d’on ne sait quelle idéologie ou religion.
Nous devons avec force protéger nos médias – surtout les plus fragiles – quand ils décident d’être indépendants des pouvoirs idéologiques.
Les politiques – le président de la République en tête – ont été unanimes pour dénoncer « un acte d’une exceptionnelle barbarie ». Mais est-ce suffisant ?
Les rassemblements spontanés dans différentes villes de France ont été décidés dès mercredi soir. D’autres auront lieu demain jeudi.
Jean-Marc Canova
Président de l’UCP2F
« Mourir pour ses idées en plein Paris », selon les mots d’une sœur d’une des victimes du carnage de Charlie Hebdo, rapportés par la ministre de la Culture hier soir. C’est cela qui explique la violence du choc, de la déflagration ; de notre sidération. Mourir pour ses idées, c’est ce qui, normalement, devient impossible quand on devient une démocratie.
Comment concevoir qu’une kalachnikov puisse tuer un coup de crayon ? Combien de dessins de Charlie Hebdo, et dans les journaux du monde entier, sur ce thème?
Hier, mercredi 7 janvier 2015, à Paris, ils ont assassiné douze personnes. Et ils ont réduit au silence Cabu et sa tendre cruauté, Tignous le féroce, Honoré le subtil, Wolinski le compagnon de toujours ; Bernard Maris et sa force de conviction, si contagieuse, si généreuse, qui comptait il y a peu encore parmi nos adhérents ; Charb le grinçant, Charb le courageux qui avait repris la direction de la rédaction, Charb le sensible qui donnait tant à comprendre dans ses éditos (*).
Ces gars là nous faisaient marrer. Mieux, Charlie Hebdo, d’une bonne Une ravageuse, en levant soudain nos angoisses, permettait à nos neurones de commencer le boulot. Je pense à cette actualité où on ne sait plus quoi penser, un 11 septembre, une guerre en Irak, des carnages en Syrie ; mais aussi, récemment, Dieudonné. Charlie avait le don de la caricature qui dénoue les paradoxes et aide à penser.
Et Charlie, pour nous autres journalistes, avait aussi la vertu de nous renvoyer l’image de nos dérapages médiatiques : la Sarkomania de 2007, la pensée unique sur l’Europe, les amalgames sur l’immigration, les dérives de l’info en continu, la course au buzz, la peoplisation.
Pour les douze hommes et femmes qui sont morts, pour ceux et celles qui sont blessés et qui garderont la blessure de l’effroi toute leur vie, Charlie doit continuer à vivre.
Les centaines de milliers de citoyens qui ont envahi les rues de France hier soir l’ont dit aussi, en scandant : « Nous sommes Charlie » ou « Même pas peur ».
Une bonne nouvelle est tombée hier soir au ministère de la Culture, où Fleur Pellerin, dans une initiative toute républicaine, a voulu, symboliquement, rassembler des représentants de la presse, directeurs de journaux mais aussi quelques représentants de journalistes comme la CFDT-journalistes, la CGT ou la Scam. Expliquant que l’équipe de Charlie qui avait réchappé de la tuerie voulait absolument sortir le journal mercredi prochain, elle a annoncé que le gouvernement le soutiendrait pour que cela soit possible. Et tous ceux qui se sont succédé au micro ont confirmé leur aide, soit par des prêts, soit par des abonnements, etc.
Chacun de nous peut s’abonner ou envoyer un don à Charlie. Et chacun de nous peut aussi porter un crayon à papier sur l’oreille, au chignon, à la boutonnière ou dans la branche de lunette pour dire que le dessin et l’écriture seront toujours les plus forts.
Isabelle Bordes, co-secrétaire des Journalistes CFDT
(*) Ayons aussi une pensée pour les autres victimes de ce drame : Frédéric Boisseau, agent d’entretien, les policiers Franck Brinsolaro et Ahmed Merabet, Elsa Cayat, journaliste, Mustapha Ourad, correcteur et Michel Renaud, Secrétaire général de l’association « Carnets de voyages Gérard Gaillard », invité ce matin-là de Charlie Hebdo.