Le festival de l’info locale (FIL) s’est tenu à Nantes au mois de septembre. Organisé par l’excellent Ouest Média Lab depuis 2019, c’est l’occasion pour les professionnels de médias locaux et régionaux d’échanger sur leurs pratiques et de se projeter sur le futur de leur métier.
Cette quatrième édition n’a pas dérogé à la règle et a cherché à décortiquer les mutations du monde des médias. Mutations sociales, sociétales, économiques, technologiques ou écologiques. Quatre thématiques étaient cette année mises à l’honneur : interaction avec le public, développement éditorial, management et conduite du changement, et enfin monétisation et diversification.
Médias : plus de proximité pour plus de confiance ?
C’est la question de la confiance des citoyens dans les médias (38% des Français seulement font confiance aux médias, selon le dernier baromètre annuel de l’agence Edelman) qui a ouvert ces rencontres professionnelles. Les médias de proximité peuvent-ils faire mieux que les médias nationaux en la matière ? Ont-ils des cartes spécifiques à jouer ? Dans le prolongement de ces interrogations se sont succédés durant deux jours divers ateliers et rencontres : développement de l’engagement (avec The Bristol Cable), impliquer les citoyens (avec la ville de Villeurbanne et le média suédois Nyhetsbyrån Järva), mieux répondre aux questions de ses lecteurs (avec Nice Matin), partir à la rencontre des habitants avec un dispositif 360° (avec Le Nouvelliste), organiser une consultation citoyenne (avec France bleu)… Un tropisme fort qui a notamment été incarné par deux des quatre projets dans la sélection finale du Prix du FIL Nouveau Média Local. L’Étincelle et Or Périph s’inscrivent dans cette veine des médias participatifs qui cherchent à réconcilier journalisme et citoyens de quartiers défavorisés.
La conduite du changement passera-t-elle par plus d’écologie ?
Si la question climatique n’est pas apparue comme une thématique à part entière dans cette édition, il a été beaucoup question de la Charte pour un journalisme à la hauteur de l’urgence climatique publiée quelques jours plus tôt. Un certain nombre de rencontres ont abordé cette question, notamment à travers la mise en valeur de médias locaux fortement mobilisés sur ces thématiques. On peut citer le basque Horizon(s) le mag (présélectionné pour le Prix du FIL Nouveau Média Local), Le Poulpe, média normand d’investigation ou encore le décapant Splann ! “ONG d’enquêtes journalistiques” et grand gagnant du prix. Méthanisation, porcherie, ammoniac… les enquêtes de longue haleine de ce média breton dénoncent les abus environnementaux et les systèmes qui les protègent. Une belle découverte tant sur le plan éditorial que sur la mise en place d’un système de financement collaboratif.
La rencontre « Réussir la transition écologique des journaux imprimés » quant à elle, aura été l’occasion de réaffirmer la nécessité d’une presse papier plus écoresponsable, relocalisée en matière d’impression, privilégiant l’usage du papier journal “cette matière pauvre, recyclée et recyclable”. Et si dans la salle on s’interroge sur l’empreinte carbone du papier face au numérique, la réponse de Pierre Petillault de l’Alliance de la Presse d’Information Générale tombe, sans appel « Le papier pèse plus lourds que le numérique, mais l’apport éditorial sur papier ne peut pas être comparé à celui du numérique ». En bref, le soin apporté et la qualité de la production éditoriale papier resteraient “par essence” supérieurs à ceux du web… On peut ne pas être d’accord, tant il est vrai que certains médias à l’instar de Splann ! n’ont nul besoin du print pour se révéler dans un travail éditorial de haute volée.
Des médias néo-aquitains de proximité bien représentés
Cette année aura été aussi marquée par la présence non négligeable de médias néo-aquitains, invités à partager leur expérience à l’occasion de tables rondes, débats, rencontres, ateliers. Le Groupe Sud Ouest est apparu en force avec notamment Marie-Luce Ribot, rédactrice en chef des magazines, hors-séries et suppléments de Sud Ouest dans une rencontre « Faire le pari des sports régionaux ». L’occasion pour elle d’évoquer le récent lancement de Raffut, consacré au Rugby. On aura pu aussi rencontrer Jean-Marie de Lauzun de l’agence de brand content du groupe Sud Ouest Eliette. Avec lui, il a été question d’innovation et de partenariat avec les influenceurs locaux, “tendance et efficace pour développer et diversifier ses annonceurs”. Les premiers résultats sont présentés comme concluants avec une vingtaine d’annonceurs accompagnés depuis le début d’année, avec un ticket moyen entre 5 000 et 15 000 euros.
Carton plein aussi pour la rencontre « Mieux piloter l’info ultralocale grâce à la data » animée par Catherine Debray, rédactrice en chef adjointe du groupe Sud Ouest, et Frédéric Sallet, datajournaliste et responsable éditorial du service Infographie du quotidien Sud Ouest.
Citons encore pour les régionaux de l’étape, l’équipe basque Horizon(s) le mag, de Champs Libres Média créé en janvier 2022 qui a présenté son travail sur l’art et la culture loin des villes en Nouvelle-Aquitaine à l’occasion de la table ronde « Repenser l’info en milieu rural ». Et bien sûr, Anne-Sophie Novel qui, entre la sortie de son livre et la Charte pour un journalisme à la hauteur de l’urgence climatique a bénéficié d’une certaine aura…
Merci à Sonia Moumen, membre du Conseil d’Administration du Club, chargée de mission « nouveaux medias » pour cette contribution.