Parler du sport sans mentionner les performances sportives ? Un défi lancé et relevé par les médias régionaux, pour qui l'accès au monde professionnel devient difficile. Les journalistes vont chercher à raconter de beaux parcours, des histoires sur de multiples thèmes pouvant intéresser un lectorat plus large.
A l’initiative de l’Union des Clubs de la presse de France et francophones (Ucp2f), la rencontre « Médias locaux : le sport au-delà des résultats », qui s’est tenue devant un public composé en grande partie de futurs journalistes venus de plusieurs Écoles, a fourni quelques pistes pour approfondir les relations entre journalistes de terrain et communicants, afin de mieux comprendre comment le monde professionnel du sport et l’amateurisme se côtoient sur les territoires, mais aussi pour mesurer les freins et obstacles qui sont encore à surmonter sur le sujet.
Lors de cet atelier animé par Richard Hecht, secrétaire général de l’Ucp2f et présenté par Sonia Reyne, trésorière, « le résultat reste la porte d’entrée du sport ! », a expliqué Vincent Coté, rédacteur en chef délégué aux sports de Ouest France. Selon lui, il ne fait aucun doute que les quotidiens de presse régionale se doivent de donner les résultats sportifs des divisions inférieures, pour assurer une plus-value auprès de leur lectorat. Une sorte d’exclusivité vis-à-vis des résultats professionnels, qui sont, eux, disponibles partout ailleurs. « On va aussi au-delà du résultat. Comme avec la création de Prolongation par exemple. La rubrique est née en pleine crise sanitaire de Covid-19. La mise en place du confinement en mars 2020 confirme l’arrêt des événements sportifs et met le journal en position délicate. Ouest France va faire le choix de raconter d’autres aspects qui touchent le sport comme l’économie ou l’écologie, à travers de belles histoires. »
Privilégier le monde amateur au détriment du professionnel
Mais l’organisation du sport professionnel ne permet pas vraiment, à l’heure actuelle, de mettre la main sur de belles histoires. « L’organisation du sport professionnel ne nous donne plus accès aux joueurs. Ils passent tous en zone mixte pour donner la même information aux médias. »
Les histoires existent pourtant et se trouvent dans le monde amateur. « On va mettre en avant les petites initiatives », poursuit Clément Chassot, journaliste au plus que centenaire journal de la vallée de la Drôme, Le Crestois. L’hebdomadaire ne peut s’appuyer sur les performances d’un club professionnel pour remplir les pages de sa rubrique sportive. À contrario, « Les rencontres avec clubs amateurs et les associations sportives permettent de faire découvrir de très belles histoires à notre public. »
Les belles histoires se trouvent aussi dans le sport santé, ou via l’inclusion par le sport. David Picot est journaliste de la rubrique sportive de La Gazette des Communes. Pour ce média à destination des collectivités locales, le résultat passe au second plan. « On s’intéresse au budget, aux subventions obtenues par les associations, aux équipements… Ce sont les rencontres qui nous permettent de raconter ces belles histoires. Mais avec les services de communication toujours de plus en plus importants, il devient difficile d’avoir accès aux gens. »
Renouer les liens
« L’attente journalistique de la Fédération n’est pas tournée vers les résultats, mais vers l’accessibilité de ces sports. » Telle est la volonté d’Aurélie Peyridieu, responsable des projets de communication de la Fédération Française Sports pour tous qui représente 2 200 associations et 140 000 pratiquants où là aussi de belles histoires sont à dénicher en termes de solidarité, d’inclusion sociale, d’éducation.
86 % des associations rattachées à Sports pour tous et fonctionnent avec des bénévoles. Mais beaucoup ne savent pas à quelle porte aller frapper pour contacter les journalistes. « Notre fédération a déjà tenté de faire remonter des sujets aux médias, mais c’était trop chronophage. » L’atelier de l’Ucp2f, a permis de pointer cette attente. L’ amélioration des liens entre journalistes et associations sportives pourrait passer, dans chaque région, par des relais, comme les Clubs de la presse. Pour atteindre un objectif commun : parler du sport, au-delà du résultat.
Texte : Corentin Teissier, étudiant en journalisme à l’IJBA et Richard Hecht, chargé de mission éditoriale du Club de la Presse de Bordeaux Nouvelle-Aquitaine et Secrétaire général de l’UCP2F.