À l’heure où les médias sont touchés par une crise économique et un besoin de penser des modèles nouveaux, l’entrepreneuriat est-il une solution ? Jeudi 23 janvier, le Club de la Presse a accueilli Flo Laval, créateur de la revue Far Ouest, et Mathieu Maire du Poset, fondateur de la plateforme Le Tank Media, pour lire la suite
À l’heure où les médias sont touchés par une crise économique et un besoin de penser des modèles nouveaux, l’entrepreneuriat est-il une solution ? Jeudi 23 janvier, le Club de la Presse a accueilli Flo Laval, créateur de la revue Far Ouest, et Mathieu Maire du Poset, fondateur de la plateforme Le Tank Media, pour en parler.
D’un côté, un média local et indépendant dans sa troisième année d’existence : c’est Far Ouest, revue en ligne sur les acteurs et le territoire de la Nouvelle-Aquitaine, qui propose des reportages écrits et vidéo à la lisière du documentaire. De l’autre, Le Tank Media, une entreprise qui a pour but d’aider à la création de nouveaux médias à travers des formations, un club d’entrepreneurs ou des espaces de travail. Pour leurs créateurs respectifs, Flo Laval et Mathieu Maire du Poset, tout est parti d’une même interrogation : comment les médias peuvent-ils se renouveler ?
À tour de rôle, chacun raconte son aventure dans la jungle de l’auto-entrepreneuriat. « On a créé Far Ouest à quatre. On n’avait pas beaucoup d’argent, notre seule vraie ressource c’était le temps », témoigne Flo Laval. Et avant le lancement de la revue en 2017, le chemin pour se former une communauté n’a pas été de tout repos. « Pendant un an, on a sillonné les librairies de la région, afin de mettre en place des partenariats, et organiser des rencontres. Le festival de journalisme de Couthures a aussi été important, pour entrer en contact avec d’autres professionnels qui pouvaient nous apporter leur regard. » Quant au financement du projet, Flo Laval souligne l’aide apportée par le Syndicat de la Presse Indépendante d’Information en Ligne (SPIIL).
Avant la création du Tank Media, Mathieu Maire du Poset était également journaliste. Il qualifie sa plateforme de « boîte polyvalente« , qui compte aujourd’hui une cinquantaine de fondateurs de médias. Sa priorité ? Faire se rencontrer les entrepreneurs pour une meilleure circulation des idées et des moyens de mise en œuvre. « Il y a mille façons de fabriquer des médias, alors on a besoin d’échanger. Le numérique est un support médiatique, mais c’est aussi et surtout un outil pour tester des projets, et créer des communautés. »
Chacun s’accorde sur un point : journaliste et auto-entrepreneur sont deux casquettes différentes, et parfois difficiles à porter simultanément. « Trouver des journalistes qui voudront travailler pour vous, ce n’est pas compliqué, parce qu’il y a peu d’offre et beaucoup de demande, avance Mathieu Maire du Poset. Mais porter un projet, faire du démarchage, trouver des partenaires et des financements, personne ne s’en occupera à votre place. Pendant un certain temps, ça contraint à changer de métier. » Mais pas de honte à devenir aussi communicant, pour Flo Laval qui ajoute : « moi, je suis comme un petit commerçant. Et comme tout gérant de commerce, j’ai besoin de faire ma pub. »
Le problème réside davantage dans la formation des journalistes, qui d’après le fondateur du Tank Media doit s’adapter davantage aux évolutions du métier pour aider les journalistes à franchir le pas de la création de média. « Les écoles de journalisme ne sont pas des écoles de médias, or une entreprise de presse ne repose pas que sur des journalistes. » Dans la même logique, Mathieu Maire du Poset regrette ce qu’il estime être un cloisonnement historique entre le journalisme et les autres secteurs de la presse.
Face à un public essentiellement composé d’étudiants en journalisme, mais aussi de quelques professionnels souhaitant se lancer dans l’entrepreneuriat, les intervenants ne cachent pas leurs incertitudes, voire leurs moments de détresse. « À trois reprises, j’ai écrit des lettres de démission, j’ai été sur le point de tout arrêter », dit Flo Laval. Le plus important est de s’accrocher à ce qui, au milieu des difficultés et des contingences, demeure intact : « il faudra toujours des médias, pour informer et pour défendre les libertés démocratiques. Si on parvient à convaincre les gens qu’on a des histoires à raconter et qu’elles peuvent les intéresser, il n’y a pas de raisons de se dire qu’on n’y arrivera pas. »