Intéresser les jeunes à l'information : ils l'ont fait. Les animateurs Gaspard G et Jean Massiet parlent de leur approche de la déontologie sur les réseaux sociaux, en refusant pourtant de se revendiquer journalistes. L'un réclame davantage de règles sur les plateformes, l'autre pas.
Une grande audience nécessite de grandes responsabilités. Le youtubeur Gaspard G et le streamer Jean Massiet ont sûrement écouté ce conseil détourné du film Spider-Man. « On a une audience grandissante et ça implique un très fort niveau de responsabilité, confirme le premier. Il y a des « darks » Jean Massiet qui font vraiment un travail de niveau moyen. » L’animateur de l’émission politique Backseat diffusée sur Twitch est en effet devenu une référence dans le milieu. « Je ne suis pas journaliste, je suis streamer, mais j’applique les règles déontologiques » assure-t-il.
Avec des lives très interactifs et des invités de qualité, son web-show est l’un des plus suivis de France. « L’enjeu c’est la confiance et la crédibilité que tu as avec ton public. C’est une « common law » qui s’écrit entre toi et lui. Le public fait pression pour que les infos que tu donnes à l’antenne soient sourcées. C’est comme un contrôle en direct sur les contenus » expose Jean Massiet, au cours d’une conférence où le public est attentif et où l’on fait référence à la sacro-sainte charte de Munich des journalistes. L’ambiance bon enfant de Backseat n’empêche pas d’aller sur des sujets de fond. « Je prends trop au sérieux la politique pour faire des blagues. C’est pas parce qu’on s’adresse aux jeunes qu’on doit faire un contenu totalement décalé. »
Un programme d’éducation pour les influenceurs
Mêmes réflexes professionnels du côté de Gaspard G, qui a réalisé une série d’entretiens et de vidéos sur les têtes de liste des élections européennes. « Après avoir interviewé les principaux candidats, nous avons décidé de monter des vidéos thématiques, sur des sujets qui ont été choisis par l’audience. Sinon on aurait fait une vidéo par candidat et Jordan Bardella aurait fait 1 million de vues quand Marie Toussaint en aurait fait 20.000. Ce n’est pas ce qu’on recherche » s’explique-t-il.
Face aux dérives de certains comptes et influenceurs, le jeune youtubeur milite pour un renforcement des règles de diffusion. « Je pousse pour beaucoup plus de régulation de notre métier. Dans les années 2010, on voyait des contenus qui étaient des publicités cachées et qui n’étaient pas signalées comme telles, c’était le Far-Ouest ! » A sa droite, Jean Massiet se veut plus mesuré. « Je ne suis pas favorable à plus de règles car les plateformes sont américaines et je ne veux pas dépendre encore plus de leurs arbitrages » opine-t-il. Le salut pourrait venir de l’Unesco. L’instance de l’ONU dédiée à l’éducation accompagne et finance un vaste programme d’initiation aux règles journalistiques et médiatiques à destination des créateurs de contenu. Une façon de manier beaucoup mieux les règles de l’information vérifiée, sourcée et (sait-on jamais) nuancée.
Texte et photo : Maxime Giraudeau, journaliste et Vice-Président du Club