« Du bon usage des réseaux sociaux par les journalistes », tel était le titre de la rencontre organisée mardi 7 avril à Sud Ouest par l’ Observatoire de la Déontologie de l’Information (ODI Bordeaux) en partenariat avec l’Association des Lecteurs Internautes et Mobinautes du journal Sud Ouest. Avec un sous-titre : « Comment maintenir la confiance du public ? lire la suite
« Du bon usage des réseaux sociaux par les journalistes », tel était le titre de la rencontre organisée mardi 7 avril à Sud Ouest par l’ Observatoire de la Déontologie de l’Information (ODI Bordeaux) en partenariat avec l’Association des Lecteurs Internautes et Mobinautes du journal Sud Ouest. Avec un sous-titre : « Comment maintenir la confiance du public ?
« – J’ai vu arriver dans cette salle de jeunes têtes, le téléphone à la main, sur Twitter ou Facebook, la relève est là ! Aujourd’hui notre monde est envahi par les réseaux sociaux. » Patrick Duprat accueillait dans les locaux du journal , au nom de l’Association des Lecteurs Internautes et Mobinautes de Sud Ouest (ALIMSO), le public principalement jeune et étudiant, venu écouter une belle brochette de spécialistes des réseaux. Avec l’appui de l’Observatoire de la Déontologie de l’Information (ODI), et la venue de son président national, Patrick Eveno, professeur des universités, le débat réunissait Jean-Marie Charon sociologue, Christine Le Hesran responsable web à France 3 Nouvelle Aquitaine, et Aude Courtin, journaliste web à Sud Ouest. Il avait été préparé avec soin et rigueur par Marie-Christine Lipani, directrice adjointe de l’IJBA, qui remerciera Sud Ouest et son directeur délégué Patrick Venries de leur accueil, avant de poser une première question de fond : « -Les réseaux sociaux semblent être déjà les médias d’aujourd’hui. Les usages sont en perpétuelle évolution, mais ils ont tendance à devenir la principale source d’information, notamment pour les jeunes. C’est un enjeu pour les médias traditionnels d’être actifs sur ces réseaux. Mais nous sommes entrés dans l’ère de la « post-vérité », où les émotions auraient plus d’importance que les faits. Alors dans ce contexte, comment maintenir la confiance du public ? »
Signature visible
Pour Christine Le Hesran, à France 3 Nouvelle Aquitaine, le principal outil est Facebook, avec une montée en puissance depuis 24 mois, et Twitter. « – Nous sommes en veille sur ces réseaux avec une grande agence, note-t-elle. Facebook est une jungle mais nous regardons les comptes sources des hommes politiques, des associations, des institutions… Nous avançons avec prudence, car cela ne suffit pas, il s’agit d’une veille. » Mais elle rappellera que « dès que l’on poste un article sur notre site, la signature doit être visible, et nous sommes très attentifs à la variété des informations que l’on peut trouver sur le territoire, une empreinte forte pour France Télévisions. »
A Sud Ouest, les nouveaux supports sont largement pris en compte, jusqu’aux smartphones. « – J’ai un outil permanent pour être sur Twitter, explique Aude Courtin, dans toutes les villes de Nouvelle Aquitaine, avec des filtres, dès que je vois quelque chose j’alerte notre agence la plus proche, à Bayonne, La Rochelle ou ailleurs. » Elle observe aussi « que beaucoup de gens nous appellent en disant sur le compte Sud Ouest, je vois la police, les pompiers, que se passe-t-il ? Et nous leur répondons ou nous nous renseignons. » Et les journalistes sont responsabilisés sur leur propre usage des réseaux. « – La charte du journal induit l’humanisme, l’indépendance, le pluralisme et le refus du prosélytisme. » Enfin, de courts messages sur Facebook sont reçus par le journal, il y existe un niveau de traitement général et un par département pour être plus proche du lecteur.
Information originale
Qu’en retiennent les chercheurs ? Jean-Marie Charon soulignera que deux sortes de médias cohabitent à présent : une forme traditionnelle où le lecteur/auditeur/téléspectateur choisissait son média, « et donc il était tributaire des choix que l’on faisait pour lui ». Et le mode horizontal de circulation d’aujourd’hui, « où le public ne se tourne plus vers un média mais vers un moteur de recherche ou des réseaux sociaux ». Le problème va alors être « la mise sur le même plan de toutes les sources ». Il refuse une diabolisation de ce phénomène, citant une enquête de 2015 menée aux U.S.A. où 63% des abonnés à Twitter et Facebook commencent par les réseaux sociaux puis vont vers les médias de professionnels. « – Il y a toujours de l’information originale dans les médias traditionnels, remarque Patrick Eveno, j’achète par exemple Sud Ouest tous les jours en Dordogne pour avoir les informations sur Sarlat. Cette demande existe et se maintient. » Pour lui les journalistes « doivent être fiers de leur travail, et rester les plus libres et responsables possibles. » Et la lutte contre les « fakes », les fausses nouvelles existait déjà à l’époque de Théophraste Renaudot… L’ODI qu’il préside au niveau national associe les journalistes, les entreprises, les associations, les syndicats et le public pour veiller sur cette liberté et cette responsabilité. Il note que « si depuis 10 ans le nombre d’informations publiées par jour a été multiplié par dix, cela représente beaucoup de copiés-collés ».
Alors, quelles solutions pour mieux situer le rôle des journalistes dans l’afflux d’informations ? Pour Jean-Marie Charon, lorsque le baromètre de La Croix depuis 1987 témoigne plutôt d’une méfiance du public envers les journalistes, c’est l’inverse qui doit être de mise : « Là où une fausse nouvelle se répand, c’est là que doit être un journaliste ! »
Christine Le Hesran observe que sur Facebook « l’algorithme veille, comme un gendarme, et s’il y a copié-collé, on n’est plus référencé. » Aude Courtin signale que 600 articles sont référencés sur le site chaque jour, et « Sud Ouest fait partie du CrossCheck de Google, le réseau de plusieurs médias qui s’engagent à vérifier l’info. »Il revenait au médiateur de Sud Ouest, Fabien Pont, d’apporter une conclusion provisoire à ce vaste débat. « -Moi, mon métier est de vérifier l’info, et j’interviens lorsque nos lecteurs nous posent des questions. Nous répondons systématiquement à tous les courriels et nous acceptons nos propres erreurs. Nous participons à l’éducation aux médias. Je pense que tous les médias devraient avoir un médiateur. »