Depuis le lundi 22 juin, un journaliste de Guinée-Conakry, Marcel Tolno, 33 ans, ayant fui son pays suite à une enquête dérangeante, est au centre de l’opération de solidarité lancée par le Club de la presse de Bordeaux-Nouvelle-Aquitaine sur la plate-forme Helloasso.com. Persona non grata en Guinée pour avoir mis en évidence des détournements de lire la suite
Depuis le lundi 22 juin, un journaliste de Guinée-Conakry, Marcel Tolno, 33 ans, ayant fui son pays suite à une enquête dérangeante, est au centre de l’opération de solidarité lancée par le Club de la presse de Bordeaux-Nouvelle-Aquitaine sur la plate-forme Helloasso.com.
Persona non grata en Guinée pour avoir mis en évidence des détournements de fonds lors d’une enquête pour le site d’informations « Guinée24.com », Marcel, traqué, a mené une vie clandestine jusqu’à ce qu’il puisse prendre le large. Arrivé en France en Novembre 2016, il souhaite « obtenir asile et protection en France, pays-symbole de la liberté expression et des valeurs de la démocratie » avait-il déclaré en novembre 2019 lors d’une table-ronde organisée à l’Institut de journalisme de Bordeaux à l’initiative du Club de la presse de Bordeaux.
Pourquoi l’opération Cagnotte pour Marcel Tolno ?
Parce que dans ses statuts il est écrit que l’association « se propose d’accueillir dans la région tous les journalistes français et étrangers en facilitant leur séjour et leur mission », le Club de la presse de Bordeaux est engagé aux côtés de ce confrère depuis des mois. Aujourd’hui, Marcel Tolno est dans une situation difficile.
Réfugié, il plaide sa cause auprès des autorités françaises pour obtenir un titre de séjour et les convaincre qu’un retour en Guinée Conakry le mettrait en danger. Si ce pays n’est pas une dictature, le régime d’Alpha Condé mène la vie dure aux journalistes guinéens et internationaux, selon RSF qui a classé ce pays au 110 ème rang mondial pour la liberté de la presse.
Pour apporter un éclairage sur la situation de Marcel Tolno, des journalistes en Guinée et en Afrique de l’Ouest, et plus largement sur la démocratie dans ces pays, le Club de la presse de Bordeaux organise une table ronde en visio-conférence, avec la participation de l’association Mémoires et Partages, du laboratoire les Afriques dans le monde (Cnrs et Sciences Po Bordeaux), de la Fédération Internationale des Journalistes et du MICA.
La table-ronde se tiendra donc le mercredi 08 juillet à 18h30 en visio-conférence.
Lien de la visio ICI
Numéro : 810 9044 6517.
Contact :
Club de la presse de Bordeaux-Nouvelle-Aquitaine : contact@club-presse-bordeaux.fr
Tél : 05 56 44 03 65
Cagnotte helloasso.com :
https://www.helloasso.com/associations/club-de-la-presse-de-bordeaux/formulaires/1/widget
Le récit de Marcel TOLNO : « Réfugié à Bordeaux, j’ai fui mon pays pour avoir mené une enquête dérangeante«
Peut-être avez-vous encore en mémoire la suspension en février 2019 de l’accréditation du correspondant guinéen de RFI, de l’AFP et de RSF, du cas de journalistes étrangers contraints de quitter la Guinée Conakry à la demande express des autorités. Moi, Marcel Tolno, 33 ans, journaliste de Guinée-Conakry, j’ai dû fuir mon pays car je n’y étais plus en sécurité alors que je travaillais pour le site de presse et d’investigation guinéen en ligne : www.guinee24.com.
L’exercice de mon métier de journaliste et mon combat pour la défense de la démocratie en Guinée m’ont mis en danger : j’ai été menacé de mort par l’armée, sous la responsabilité directe du régime corrompu et autoritaire du Président Alpha Condé.
Mes problèmes commencèrent lorsque l’enquête que j’ai menée à l’Office Guinéen de Publicité (l’OGP) en 2014 a été rendue publique. Elle a permis de démontrer la corruption qui règne au sein de cet organisme d’État : plus de 40 milliards de francs guinéens ont été détournés par les responsables de la Direction Générale avec la complicité de hauts cadres du Ministère de la Communication.
L’armée a alors été mobilisée pour m’éliminer avec l’aval des plus hautes autorités dirigeantes du pays. Appels anonymes, intimidations, filatures par des individus en uniformes ou en civil, menaces pour mon intégrité physique, jusqu’aux menaces de mort, ont été mon quotidien durant presque une année. J’ai mené une vie clandestine après une descente musclée des forces de police à mon domicile de Matoto en mars 2015.
Le 30 mars 2015, enfin, un rapport d’audit du Ministère des Finances et de l’Économie a incriminé les bénéficiaires du détournement de fonds publiques. Cependant, couverts par la Présidence, ils ne sont pas inquiétés alors que les menaces continuent de peser sur moi et se font de plus en plus précises. De cachette en cachette, effrayé, menant une vie de paria dans mon propre pays, j’apprends qu’un collègue journaliste, Cherif Diallo est porté disparu depuis le 23 juillet 2015. Le 5 février 2016, mon collègue Mohamed Koula est tué par balle. Voilà le sort qui est réservé aux journalistes qui exercent librement et de manière indépendante leur métier dans mon pays.
Malgré le soutien de ma corporation (l’Association Guinéenne de la Presse en Ligne, l’Association guinéenne des Éditeurs de la Presse Indépendante), ma situation continue de se dégrader.
Grâce à ma participation aux 45èmes Assisses à Madagascar, je parviens à quitter le sol guinéen avec l’Union Internationale de la Presse Francophone, en novembre 2016. Je peux alors gagner la France via Paris.
En mars 2019 avec l’aval présidentiel et après un procès truqué contre Paul-Moussa Diawara, le patron de presse et directeur de l’OGP qui avait commandité mon enquête est emprisonné, puis libéré sous contrôle judiciaire. Actuellement il ne peut toujours pas exercer son métier de patron de presse indépendante. Dans ces conditions, je ne peux revenir en Guinée.
Réfugié en France, j’effectue toutes les démarches pour obtenir le droit d’asile qui m’a été refusé en 2019. Actuellement, j’effectue des démarches pour obtenir un titre de séjour de longue durée. Je suis étudiant en Information et communication à l’université de Bordeaux Montaigne. Avec le Club de la Presse de Bordeaux j’ai pu livrer mon témoignage sur la situation du journalisme indépendant en Guinée lors d’un débat à l’IJBA à l’automne dernier.
Depuis mon arrivée en France, le titre de séjour provisoire qui m’avait été attribué ne me confère pas le droit de travailler. Je contribue à de nombreuses activités associatives et bénévoles : engagement dans la prévention contre le sida, les MST, avec l’association reconnue d’utilité publique AIDES, investissement régulier dans l’association cultuelle de la paroisse de Saint Michel, travail bénévole (manutention, distribution) auprès des Restos du Cœur dont je suis également bénéficiaire.
Je vis sans ressources autres que le soutien indéfectible d’une poignée d’amis et d’associations dont la Fédération internationale des journalistes. Je sais que beaucoup de journalistes galèrent au quotidien. La situation me conduit à solliciter votre soutien moral, matériel et financier. Aujourd’hui, je m’adresse directement à vous car votre solidarité me serait précieuse pour tenir le coup et poursuivre ma mission depuis la France.