Mediapart ne pourra publier un nouveau volet de son enquête sur le maire de Saint-Étienne suite à une ordonnance rendue en urgence par le tribunal judiciaire de Paris. Une atteinte unique à la liberté de la presse.
« Censure préalable sans précédent » basée sur une « procédure totalement étrangère au droit de la presse », atteinte inadmissible à la loi du 29 juillet 1881 qui pose les fondements du droit d’information et la liberté d’expression, s’insurge le directeur de la publication, Edwy Plenel. En cause, l’ordonnance du tribunal judiciaire de Paris rendue en urgence, vendredi 18 novembre, à la demande du maire de Saint-Étienne, Christophe Perdriau, enjoignant à Mediapart “de ne pas publier sous astreinte de 10 000 euros par extrait publié de nouvelles révélations sur les pratiques politiques du maire de Saint-Étienne. »
Le site d’information en ligne avait révélé le chantage à la vidéo intime dont aurait été victime le premier adjoint centriste, Gilles Artigues.
Suite à la requête déposée par le conseil de Gaël Perdriau au nom de la défense de la vie privée, la justice interdit au site d’information de publier une nouvelle enquête sur le maire de Saint-Étienne.
Cette procédure, qualifiée d’expéditive par Edwy Plenel s’appuie sur deux articles du Code de procédure civile, explique-t-il : l’article 493 (…), selon lequel « l’ordonnance sur requête est une décision provisoire rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse » et l’article 875, qui relève des « dispositions particulières au tribunal de commerce ». Sur la base de l’article 875 : « le président peut ordonner sur requête, dans les limites de la compétence du tribunal, toutes mesures urgentes lorsque les circonstances exigent qu’elles ne soient pas prises contradictoirement. »
Déjà, début octobre dernier, le tribunal de commerce de Nanterre avait rendu une décision basée sur des motifs très voisins. En interdisant la parution de nouveaux articles, cette juridiction avait tranché en faveur du groupe Altice qui poursuivait le site d’informations en ligne Reflets.info après la publication d’articles étayés à partir de documents dérobés par des pirates informatiques.
Lire la tribune « Une attaque sans précédent contre la liberté de la presse » publiée par Informer n’est pas un délit et signée par plusieurs médias, collectifs, associations et sociétés de journalistes → www.informernestpasundelit.org
Mise à jour mercredi 30 novembre. Ce jour, le tribunal judiciaire de Paris a annulé l’ordonnance rendue le vendredi 18 novembre à l’encontre de Mediapart.
La DGSI convoque des journalistes
Avec pour motif d’ avoir porté atteinte au secret défense nationale, trois journalistes sont prochainement convoqués devant la justice. Selon l’AFP, et plusieurs médias dont Le Monde : »La direction générale de la sécurité intérieure les soupçonne d’avoir divulgué une « information permettant l’identification d’un membre d’une unité des forces spéciales ». Ces trois confrères de Radio France et « Disclose » qui enquêtaient sur des soupçons de trafic d’influence dans l’armée française sont convoqués en audition libre à la DGSI après une enquête diffusée en 2018.
Bonne nouvelle !
Le média Reflets peut continuer à enquêter sur le groupe Altice, n’en déplaise à Patrick Drahi son propriétaire. La cour d’appel de Versailles (Yvelines) a en effet annulé cette semaine la décision du tribunal de commerce de Nanterre (Hauts-de-Seine). En octobre, ce tribunal avait ordonné une censure préventive du site estimant que le travail journalistique de Reflets portait atteint au secret des affaires.
Maj 20/01/2023