Déclaration de EAEA et de la FEJ à l’occasion du forum « Avenir de l’Europe, avenir de la culture » Les professionnels de la culture représentés par leurs organisations syndicales européennes s’adressent aux ministres de la culture pour leur faire part de leurs vives inquiétudes vis-à-vis des politiques culturelles actuellement menées au sein de l’Union lire la suite

Déclaration de EAEA et de la FEJ à l’occasion du forum « Avenir de l’Europe, avenir de la culture »

Les professionnels de la culture représentés par leurs organisations syndicales européennes s’adressent aux ministres de la culture pour leur faire part de leurs vives inquiétudes vis-à-vis des politiques culturelles actuellement menées au sein de l’Union européenne.

Au même titre que d’autres secteurs de l’économie, les institutions culturelles et les opérateurs des médias peuvent être affectés par la récession mondiale et les politiques d’austérité. Cependant, l’idée selon laquelle les dépenses en faveur de la culture ne seraient qu’un luxe et devraient, à ce titre, être réduites ou supprimées relève d’une approche à courte vue extrêmement choquante.

Au niveau des États, les budgets culturels sont trop souvent devenus des variables d’ajustement des politiques économiques nationales : de nombreux orchestres, théâtres et compagnies ont purement et simplement disparu. Tous les pays d’Europe connaissent un recul sans précédent des financements publics de la culture. Les opérateurs nationaux sont les plus touchés mais, dans toutes les régions, ce recul frappe tous les niveaux de la création et de la diffusion.

Les services publics de radiodiffusion de nombreux pays sont victimes d’une réduction drastique des moyens qui leur sont alloués avec, à la clé, la suppression d’un nombre élevé d’emplois et un réel affaiblissement du service public des médias auxquels s’ajoute de plus en plus fréquemment la menace d’une perte d’indépendance éditoriale. La qualité, l’indépendance et la pérennité de ces services sont ainsi mises en danger de même que le pluralisme et les valeurs démocratiques dont ils sont les garants selon les termes du Protocole d’Amsterdam concernant le service public de radiodiffusion. Les dispositifs d’aide publique à l’économie du cinéma font également l’objet de coupes significatives. La remise en question par la Commission des politiques de soutien des états membres empêche le développement d’une politique industrielle forte et fragilise la diversité culturelle.

Dans ce contexte, les travailleurs de la culture et de l’information souhaitent attirer l’attention des ministres sur quelques points clés à prendre en considération au niveau européen :

La culture n’est pas une marchandise. L’Union européenne doit maintenir celle-ci hors du champ des négociations commerciales internationales. À cet effet, la Convention de l’UNESCO sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles doit devenir la clé de voûte de toute politique européenne dans ce domaine.
La protection sociale des travailleurs de la culture et de l’information doit être maintenue et développée, conformément à la Recommandation de l’UNESCO sur la Condition de l’artiste de 1980. Elle ne doit en aucun cas être fragilisée, voire remise en cause par les politiques d’austérité.
Alors que les services audiovisuels sont exclus du champ d’application de la directive « Services », le spectacle vivant reste soumis à ses dispositions. Nous souhaitons que l’ensemble du secteur culturel fasse l’objet d’une exclusion du champ d’application de cette directive lors de sa révision.
Nous appelons à une réflexion approfondie sur la TVA en Europe afin de mettre un terme aux distorsions fiscales qui pénalisent les entreprises et les économies européennes face aux géants du net.
Nous constatons de nombreuses atteintes aux droits de propriété intellectuelle, qui constituent pourtant un élément essentiel de l’économie du secteur de la culture et de l’information. Alors même que la piraterie commerciale continue à piller les auteurs, les artistes interprètes et les producteurs, la banalisation de l’utilisation gratuite non autorisée d’œuvres protégées tend à vider de son sens la notion même de propriété intellectuelle. Au niveau des États membres, plusieurs initiatives législatives réduisent considérablement la portée de ces droits sans prévoir la moindre compensation pour les créateurs en contrepartie de ces limitations.
Bien que les œuvres et contenus résultant du travail des auteurs, artistes interprètes et journalistes soient plus utilisés que jamais du fait de la démocratisation accélérée de l’accès à l’Internet, les travailleurs créatifs profitent fort peu des revenus considérables qu’ils génèrent et sont souvent forcés de céder leurs droits contre une rémunération forfaitaire. Ils doivent pouvoir obtenir une rémunération pour toutes les formes d’exploitation de leurs œuvres au moyen d’un partage de la valeur juste et équitable. Leurs droits moraux doivent également être reconnus, notamment le droit de paternité et le droit au respect de l’intégrité de leur travail. Par ailleurs, les entreprises qui utilisent leurs créations et leur travail, quel que soit leur lieu d’implantation et l’environnement dans lequel elles opèrent, doivent contribuer au financement des œuvres et à la création de nouveaux contenus, de façon à garantir et à développer la croissance et l’emploi du secteur.
En conclusion, nous affirmons que l’investissement public dans les secteurs de la culture et de l’audiovisuel ne peut pas être purement et simplement remplacé par des investissements privés. Une telle approche remettrait en cause le droit des citoyens d’accéder à des œuvres et répertoires qui sont absents de l’offre commerciale. Le soutien à la musique symphonique, à l’opéra, au théâtre, à la danse et au ballet, qui constitue une part précieuse et fragile de notre patrimoine culturel, relève en tout premier lieu de la responsabilité des gouvernements nationaux, régionaux et locaux. Dans le secteur de l’audiovisuel, il faut assurer au service public de radiodiffusion des moyens financiers pérennes et conséquents qui garantissent à la fois son indépendance économique, éditoriale et créatrice et le pluralisme de l’information. Les états membres et l’U.E. doivent enfin favoriser l’adoption de mesures de soutien spécifiques afin de permettre le développement d’une industrie cinématographique forte et diversifiée.

L’Europe consacre moins de 0,5 % de son budget global à la culture. Nous considérons qu’une véritable ambition culturelle est indispensable pour donner du sens à la construction européenne et valoriser un patrimoine culturel qui constitue l’un des fondements de l’identité et de la place de l’UE dans le monde.

L’Alliance Européenne des Arts et du Spectacle (EAEA) réunit les fédérations EuroFIA, FIM et EuroMEI. Elle représente les travailleurs du secteur des arts et du spectacle dans les pays membres de l’Union européenne et dans les comités du dialogue social sectoriel européen. EAEA est membre de la CES. Wwwiaea-globalunion.org / contact@iaea-globalunion.org

La FEJ est l’organisation rassemblant le plus grand nombre de journalistes en Europe et représente environ 320.000 journalistes dans 39 pays. La FEJ lutte en faveur des droits sociaux et professionnels des journalistes actifs dans tous les secteurs des médias à travers l’Europe par le biais de syndicats et d’associations professionnelles fortes. www.ifj.org/regions/europe/ efj@ifj.org

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