
Du journalisme à la fiction, du reportage au documentaire, tous les angles de la création sonore ont été explorés lors la 21ème édition du festival Longueur d’Ondes de la radio et de l’écoute qui s'est tenu à Brest du 29 janvier au 02 février.
Au Quartz, scène nationale de Brest, les trois reporters Charlotte Perry (France Inter), Martine Abat (France Culture) et Alexandre Héraud (Blast) ont dévoilé les coulisses, les techniques et les caractéristiques de leur métier lors d’une table ronde intitulée « Profession : reporter ».
Leur définition du métier fait l’unanimité. Un reporter, c’est « celui qui sors du studio et qui va dehors, chez les gens, dans les usines s’il peut, ailleurs que dans le studio, pour apporter ce qui s’y dit, ce qui s’y passe » déclare Martine Abat. Pour Charlotte Perry, c’est aussi partir « à la rencontre des gens qui font ce pays, cette société ». Le reportage, c’est aussi souvent ce à quoi on s’attend pas. « On vient avec quelque chose et on se retrouve avec autre chose » en témoigne la reporter.
« Sur le terrain, la parole est plus facile »
L’importance du lien social et de confiance avec les personnes interviewées est primordiale. Les reporters notent une vraie différence avec les rencontres tenues en studios. « Les gens sont beaucoup moins désincarnés, ils sont dans le lieu où ils existent, ils sont chez eux, dans leur meuble. On comprend beaucoup de choses par le contexte dans lequel ils sont. » explique Charlotte Perry. En comparaison avec le cadre du studio, « c’est une parole qui peut être plus facile, plus libre » rebondit Martine Abat. Pour Alexandre Héraud, le reportage radio révèle « authenticité des voix ». Il exprime aussi que, parfois, sortir du studio c’est aussi se rendre dans des institutions tout en « s’affranchissant de l’autorité et des services de communications ».
Les trois reporters affirment devoir toujours veiller à garder la bonne posture et la distance adéquate. « Y’a le côté caméléon que j’essaie d’avoir, où je peux être aussi à l’aise dans un bureau de ministre que sur un piquet de grève » affirme Alexandre Héraud. Selon lui, c’est « la curiosité qui fonde la rencontre ». Pour Martine Abat, il faut « écouter beaucoup et faire feu de tout bois, (…) essayer d’être le plus possible en lien, de se mettre à la place de l’autre ». L’empathie et l’écoute seraient donc les clés. Elle dit même parfois rester en lien avec des personnes rencontrées. « On se donne des nouvelles » déclare-t-elle.
En ce qui concerne les techniques du métier, les reporters manifestent des techniques variées : simple dérushage, pré-montage ou montage finalisé, les méthodes dépendent aussi des rédactions et des équipes avec lesquelles les journalistes collaborent. Leurs spécialités, quant à elles, se sont faites avec le temps, les parcours et les expériences.
Le reportage, un travail d’équipe
Le trio a fait l’« éloge du réalisateur » et a remis au centre ces relations de confiance et ces complicités essentielles à la création de bons reportages. « Quand t’as un bon réal, il peut faire des miracles » affirme Charlotte Perry. La radio demande un jeu et un traitement du son abouti. L’écoute doit faire naitre des images mentales, des paysages, que cela soit par les questions posées, les choix éditoriaux ou les habillages sonores réalisés.
Et quand une jeune diplômée d’école de journalisme déclare « Tout le monde dit que c’était mieux avant », la table ronde s ‘achève sur une pointe de nostalgie. Une certaine inquiétude se fait ressentir à propos de l’avenir de ce métier qui voit ses temps d’antennes diminués. « On a tous des difficultés à faire notre travail et à en vivre » témoigne Martine Abat.
« C’est l’hécatombe de la culture en France, mais il va falloir résister » encourage Alexandre Héraud. Pour lui, le « podcast est fabuleux ». Il dit même y avoir trouvé « la même énergie il y a huit ans que celle trouvée dans les radios libres » à ses débuts. Des pistes d’espoir sont alors mises en avant, comme le développement du podcast natif et le manque de témoignages qui commence à se faire ressentir à l’antenne. Pour la reporter Charlotte Perry, « il y a déjà une grande méfiance envers les journalistes et il est important que les reporters aillent à la rencontre des gens et recueillir cette parole, qu’elle vive dans l’espace démocratique qu’offre la radio ».
Léna Salat