Journaliste d’investigation au Monde, il est l’auteur de plusieurs ouvrages sur des affaires impliquant les services secrets. Et il décrit le fonctionnement de ceux-ci dans notre démocratie, aux prises avec des événements qui exigent de plus en plus d’efforts dans les politiques de protection des citoyens et de lutte contre le terrorisme. Jacques Follorou était lire la suite
Journaliste d’investigation au Monde, il est l’auteur de plusieurs ouvrages sur des affaires impliquant les services secrets. Et il décrit le fonctionnement de ceux-ci dans notre démocratie, aux prises avec des événements qui exigent de plus en plus d’efforts dans les politiques de protection des citoyens et de lutte contre le terrorisme.
Jacques Follorou était au Club de la Presse pour présenter « L’Etat secret », son dernier ouvrage paru chez Fayard. C’est Jean-Claude Guicheney, le président girondin de la Ligue des Droits de l’Homme, qui a présenté l’auteur « au moment où l’on célèbre les 70 ans de la Déclaration Universelle ». Il y décrit le fonctionnement des services et de l’arsenal légal, et interroge sur la meilleure façon d’exploiter les renseignements recueillis de partout par l’Etat, pour prévoir et agir contre la nouvelle barbarie, tout en respectant les lois et les règles de nos démocraties.
Jacques Follorou explique son travail au service international du journal Le Monde, dans des pays « où un certain type de violence, avec des attaques complexes, s’est développé. Quand cette violence terroriste arrive en France en 2015, si l’on rassemble tout ce qui s’est passé jusqu’en 2018, on voit que notre société a changé. C’est l’avancée du secret, et l’émergence d’une société ultra-privative. Je ne conteste pas que les services de renseignement aient besoin de moyens de géolocalisation, d’écoute, etc… Mais la démocratie a été mise à l’écart de la révolution du renseignement.»
La gestion du risque et de la menace de mort
« Dans ce livre, ajoute Jacques Follorou, je me garde bien de faire des critiques légères. Le débat concourt à l’efficacité. Selon la Constitution, le Parlement contrôle l’action du Gouvernement. Je ne critique pas ici les services de renseignement, je demande comment on gère l’existence du risque et de la menace de mort ? »
L’ouvrage pointe notamment les relations entre les services de renseignements civils et militaires, la complexité des actions des administrations, et l’insuffisance de la collaboration internationale, même si des progrès ont été faits. Il cite par exemple cinq pays qui ont passé un accord d’échange de renseignements : les USA, la Grande-Bretagne, l’Australie, le Canada et la Nouvelle-Zélande. Mais en Europe la situation n’est pas toujours simple, pas plus qu’entre l’Europe et les Etats-Unis.
« Nous observons que le périmètre du secret ne correspond souvent pas à la réalité de ce qui doit l’être. Des choses placées sous le secret gagneraient beaucoup à faire l’objet d’un débat public. »
A une journaliste qui lui demande si chez nous l’alternance politique modifie la situation, il répond que non, « quand François Hollande arrive à l’Elysée, le premier ministre Ayrault a dû lui aussi relancer l’encadrement par la loi. »
Il cite enfin Edgar Snowden, interviewé dans son livre, et ses milliers de documents révélés : « Il a ouvert un grand champ d’action, mais en France on ne l’a pas utilisé, et rien de semblable n’a jamais été fait. Or, la force du renseignement est quelque chose de sérieux, qui doit être géré par un gouvernement civil. »
« L’Etat secret », par Jacques Follorou, Editions Fayard, 282 pages, 20 euros.